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Tableau de la vie artistique en province

Nous sommes ici affligés par X. Un type bien pensant autant que fadasse qui en matière d’art décrète la pluie où le beau temps dans les alentours. Quand il peint passe encore, c’est à pleurer ; mais quand il sculpte, c’est à mourir. Un type qui s’arroge le droit de juger de la valeur des oeuvres des autres en vertu d’on ne sait quel mystère ; avec ce genre de personne, c’est toujours la même histoire. De sorte que plus le temps passe et pire c’est, plus ce qui est proposé dans les concours locaux est ringard, c’est à dire plus c’est bien léché techniquement et académiquement et plus ça n’exprime rien, plus c’est primé. Il a réussi à fourguer ses saintes horreurs un peu partout dans les environs, à remplir les places, squares, églises et écoles de villages avec ses mochetés. Et ce n’est même pas lui le pire.


 Parce qu’il y a de nombreux équivalents dans des genres différents. Ce niveau est même ici (comme partout ailleurs sans doutes) « le politiquement correct de la peinture ». Cela consiste à faire du « techniquement à peu près bien lèché », à ne rien exprimer sinon un exercice de style prouvant qu’on a assimilé les techniques, à faire de préférence du « paysage local », si possible jusqu’au strabisme. Certains tableaux de ce genre sont tellement raffinés qu’il ne manque pas même le fil électrique et son poteau au beau milieu, de sorte que si l’auteur avait eu un peu d’immagination, il aurait pu se contenter de ce détail, ça aurait fait quelque chose d’original.


 Il y a ensuite tous les « nus et portraits » dans le style « salon de coiffure des années soixante », ce qui est gratiné, disons-le. C’est un genre qui suscite une certaine admiration également. Sans oublier les fleurs. Ah les fleurs ! Les jolies fleurs ! Des tournesols en série, sur pied, en pot, en vase, géants; pauvre Van Gogh, il n’en demandait pas tant. Et puis les « natures mortes ». On ne peut trouver plus mortes. C’est tout.


 Ce sont souvent les femmes d’ailleurs, qui pratiquent ces deux genres. Et en général, les fleurs leur réussissent mieux qu’aux hommes, dans l’ensemble. Pour les nus et les figures, elles font disons aussi mal mais dans un style immédiatement reconnaissable. Personne mieux qu’elles ne sait vous faire une vierge à l’enfant, où disons en général une maternité, plus mièvre. (Les hommes vous font plutôt un Tut-Ank-Ammon, dans le pire des cas, et dans le meilleur une odalisque, je ne sais pas si je rend bien l’idée). Je parle de ce que j’ai pu voir dans certaines expositions de la province, en général, pas particulièrement de ce que font les adhérents de l’association à laquelle j’appartenais jusqu’à présent. Dans l’ensemble, ils font plutôt mieux.


 Mais quoi qu’il en soit, il y a plus d’hommes que de femmes qui peignent et qui exposent. En fait, si moins de femmes peignent, il y en au moins autant aussi capables que leurs collègues masculins, il y en a même qui sont de véritables artistes et qui ont une production infiniment meilleure que beaucoup d’hommes jouissant de davantage de considération qu’elles, simplement parce que ce sont des hommes…


Bien évidemment, à part quelques éléments qui sont passés maîtres de ces genres, ça ne ce vend tout de même pas tellement, vu l’inflation « artistique ». De sorte que le pire qui puisse arriver sont les donations. Les « artistes » sont tellement désireux de ne pas passer inaperçus qu’ils vous refilent leurs oeuvres gratis, de sorte que celles-ci hantent le moindre recoin, les couloirs de municipalité et autres édifices publiques. Les expositions pullulent dans les supermarchés, les moindres passages couverts et places publiques, de sorte qu’elles semblent davantage une attraction de fête foraine.


 Bref, la plupart commettent des pouilleries, disons-le franchement, ce qui n’est pas si grave tant que ce n’est qu’un hobby innocent qui ne fait de mal à personne et du bien à ceux qui le pratiquent. Là où c’est plus gênant, c’est quand ils commencent à se prendre au sérieux et à se prendre véritablement pour des artistes quand ce ne sont que des artisans de la peinture, et encore. Et, outre à être ennuyeux, c’est fou, parce qu’ils se chamaillent, se marchent sur les pieds, s’écrasent les uns les autres pour acquérir la meilleure visibilité. De quoi se sauver…


Ainsi, je me suis retirée de l’association locale à laquelle j’appartenais. Je n’ai pas pu leur faire comprendre qu’on ne pouvait tout de même pas faire n’importe quoi. Cela ressemble davantage à une fête foraine qu’à une exposition de peinture et n’a aucune possibilité de déboucher sur la seule chose qui aurait pu présenter un intérêt : la création d’une galerie, d’une pinacothèque comunale et de la gèrer. J’ai donc définitivement laissé tomber quelque chose qui n’offre aucun intérêt pour moi, et qui m’ennuie passablement.


 Janv.2003



Ecrit par Lory Calque, le Mercredi 9 Août 2006, 18:53 dans la rubrique De l'Italie.