Discrimination
La discrimination fondée sur le sexe est illégale dans de nombreux pays. Mais même après l'égalité des sexes établie dans la loi ou la constitution, il reste souvent des us et coutumes conférant des « droits » ou des « privilèges » aux hommes. Dans certains domaines, les femmes peuvent paraître avantagées, notamment en ce qui concerne :
- les obligations militaires;
- l'âge de la retraite ;
- les droits de pension ou de garde en cas de divorce .
En fait il n'en est rien, toutes les statistiques relatives à la pauvreté signalent un net désavantage féminin, notamment pour celles qui restent seules avec leurs enfants. 85 % des parents en situation de famille monoparentale en Europe sont des femmes. En outre, dans 66 % des cas, les pensions alimentaires ne sont pas entièrement ou pas du tout versées par les pères en France. En 1990, le ministère de la Justice du Canada a procédé à une enquête qui a révélé qu'après un divorce, 46 % des femmes vivaient sous le seuil de pauvreté, comparativement à 10 % des hommes.
Les hommes sont nettement avantagés dans l'accès à certaines professions, et plus généralement dans le développement de carrière. Dans ce domaine, la maternité est pour les femmes un handicap, alors que le fait d'être père de famille constitue pour l'homme un atout dans la carrière, notamment pour les cadres supérieurs.
Différence salariale et professions « féminines »
Les salaires des femmes sont souvent inférieurs, à poste identique, et l'exercice du pouvoir en entreprise est trop souvent l'apanage des hommes. Enfin, en politique, les femmes sont nettement moins présentes, sauf dans les pays scandinaves. Ce déséquilibre a donné lieu au concept de parité .
Les professions traditionnellement féminines sont nettement dévalorisées. Les secteurs professionnels traditionnellement masculins, où les femmes ont commencé à entrer massivement au cours du XXème siècle, ont été peu à peu désertés par eux, et véhiculent donc à présent une image dévalorisée et par conséquent sont de plus en plus mal rémunérés.
Dans nombre de domaines, les sociétés occidentales modernes restent sexistes. Un certain nombre de secteurs professionnels ou de professions restent presque exclusivement le domaine d'un sexe ou de l'autre. Dans le monde du travail la disparité reste immense : les possibilités d'emploi sont moindres pour les femmes et la précarité plus grande pour elles, et elles doivent trop souvent, pour réussir professionnellement, s'adapter au modèle masculin et en adopter les valeurs de compétitivité et d'agressivité [1].
L'inégalité des sexes dans le travail domestique
Cette disparité existe tout autant dans le monde familial et domestique. Le rapport de l'ONU en vue de la Conférence de Pékin en 1995 a démontré que les femmes sont largement victimes de la « double journée ». En moyenne, elles consacrent au travail familial et domestique, « invisible » et non rémunéré, beaucoup plus de temps que leurs compagnons. Ce cumul de labeur effectué à l'extérieur et à demeure conduit les femmes à travailler en moyenne 13 % de plus que les hommes. La masse mondiale du seul travail domestique féminin, gratuit et indispensable au fonctionnement d'une société, représentait, en 1995, onze milliards de dollars et les 2/3 du seul travail féminin. Les femmes travaillent donc plus et gagnent moins que les hommes. Dans les sociétés post-industrielles occidentales, à la « double journée » vient s'ajouter la « triple présence », puisqu'outre à leur travail et à leur foyer les femmes doivent fréquemment se charger des personnes âgées démunies. Cette tendance générale semble empirer depuis 1995, avec le chomage et la précarité.
Il est cependant vrai que celles qui ont la chance d'avoir un emploi correctement rémunéré et de percevoir régulièrement une pension alimentaire voient le départ de l'homme alléger leur charge de travail ménager de six heures hebdomadaires [1].
Les inégalités dans l'éducation
De nombreux stéréotypes concernant l'éducation des fillettes sont restés les mêmes durant les dernières décennies et n'ont évolué qu'assez récemment quant au partage des taches domestiques : plus de la moitié des filles de plus de onze ans y dédient quotidiennement au moins une heure alors que 30% des garçons n'y consacrent que moins d'une demi-heure par jour.
À âge égal, il est généralement demandé davantage aux filles qu'aux garçons, et celles-ci se trouvent chargées de davantages de responsabilités au sein de la famille : menus services et travaux ménagers, courses ou préparations alimentaires, garde des frères et sœurs plus jeunes en l'absence de baby-sitter (personnel presqu'exclusivement féminin) si les parents travaillent.
Pourtant, elles réussissent globalement mieux à l'école et sont statistiquement plus performantes et plus diplômées. Cela ne se traduit cependant pas dans la vie professionnelle où les proportions sont non seulement inversées mais largement amplifiées au détriment des femmes. La sous-performance scolaire des garçons émerge désormais. Plus libres de jouer, moins de responsabilités familiales leur incombant, ils tendent à se sentir plus facilement exonérés du travail scolaire.
Les jeux électroniques sont davantage offerts aux garçons, ce qui tend à inculquer aux filles une certaine réticence face aux objets tels que les ordinateurs.
Difficultés, discriminations et handicaps
La maternité reste un handicap majeur dans la vie professionnelle féminine. La maternité est en effet perçue par nombre d'employeurs comme une cause supplémentaire d'absence qui, pour un poste donné, leur fait préférer un homme. Cependant, d'autres obstacles de nature plus opaque contribuent à ces difficultés. Dans de nombreux cas, ce n'est pas tant la discrimination volontaire de la part de leurs collègues ou supérieurs masculins qui rentre en jeu aujourd'hui. D'une part, le monde du travail est structuré de façon trop rigide en dépit de quelques lois permettant certains aménagements horaires ; vu les travaux domestiques qui leur incombent et les enfants à charge, il est difficile pour les femmes de s'y adapter. D'autre part, il semble que les femmes ne disposent pas de certaines ressources sociales nécessaires dans une stratégie de projet et de carrière qui sont toutes basées sur des mécanismes de cooptation de la part du groupe dominant masculin, souvent réticents à accepter leurs collègues féminines, ou tout simplement parce qu'ils s'attendent à ce que celles-ci réagissent comme eux. Deux de ces mécanismes basiques ont été analysés par les sociologues :
- L'effet « Token » :
Celui-ci analyse les règles générales de la stratification du pouvoir, selon les trames Token Ring parcourant l'anneau dans un sens qui est toujours le même. Il semble que les femmes tendent à assumer des comportements qui ne leur sont pas naturels, et qui à la longue jouent en leur défaveur, lorsqu'elles entrent en contact avec un milieu essentiellement masculin. Ne se sentant pas vraiment acceptées mais confrontées aux pressions du groupe masculin dominant attendant d'elles qu'elles changent leur manière d'être, un grand nombre de femmes réagissent par deux types de réactions défensives qui jouent contre elles : d'une part l'hyperconformisme et tout le zèle du néophyte qui leur en fait faire de trop de sorte qu'elles se vassalisent rapidement, ou la fugue dans l' « invisibilité », cherchant à être le plus « neutre » possible de façon à ce que l'on s'aperçoive le moins possible de leur présence ; passant inaperçues il ne leur sera guère proposé un travail plus intéressant, même si elles ont toutes les capacités pour le faire.
- L'effet « Matthieu » :
Il tire son nom de l'évangéliste qui rapporte les paroles [2] de Jésus Christ selon lesquelles ceux qui ont la foi augmenteront leur grâce et ceux qui ne l'ont pas seront précipitées dans l'éternelle damnation. En l'occurrence, ceux qui « ont » (le pouvoir) sont les hommes et celles qui « n'ont pas » sont les femmes. D'après les recherches de la sociologue Judith Lorber à ce sujet, il semble bien que, quand les femmes perdent le fil conducteur de l'évolution de carrière (souvent à cause d'une maternité), elles accumulent les désavantages et ne se sortent que très difficilement de ce cercle vicieux. Exclues du cercle vertueux du prestige et du pouvoir, elles se retrouvent souvent pour le restant de leur vie condamnées aux emplois subalternes peu gratifiants et peu rémunérés.
[2] « A celui qui a, on donnera ; à celui qui n’a pas, on ôtera même ce qu’il a », d'après la parabole des talents, Évangiles de St Matthieu 25/29.
Le danger revanchard et néo-libéral du masculinisme
Le chercheur québécois Jean-Claude-Saint-Amant (de l’Université de Laval Québec ), décrit ainsi un phénomène né en Amérique ces dernières années et en passe de s'implanter en Europe:
- On peut justifier très facilement de parler de condition féminine, comme on peut parler de condition ouvrière, ou ici au Canada de condition autochtone ; il s’agit là de groupes particuliers qui pour un certain nombre de raisons subissent des discriminations. Mais on a utilisé le terme et on l’a tout simplement inversé. C'est-à-dire, si la condition féminine existe, il existerait une "condition masculine". À partir du raisonnement suivant : s’il y a égalité entre les sexes, il doit y avoir un pendant masculin à la condition féminine. À ceci près qu’il n’y a pas de réalité qui rejoint les mots, il n’y a pas d’hommes systématiquement discriminés en tant qu’hommes. Oui, il y a des discriminations sur la base de la classe sociale où des hommes sont aussi victimes, mais ils ne le sont pas en tant qu’hommes. Donc à partir de concepts détournés de leur sens, les « masculinistes » se sont donné une légitimité,
Usurpant ainsi en le détournant à leur profit le contenu du féminisme, un esprit revanchard néo-patriarcal tend à se développer à la faveur du retour des gouvernements libéraux dans divers pays, cherchant à faire régresser les acquis des femmes en matière de législation.
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