Les femmes, dans la production artistique, sont surtout présentes en tant que transcription des images que les hommes se font d’elles. Mais en est-il vraiment ainsi et n’ont-elles d’autre rôle ?
L’histoire de l’art, la peinture, la sculpture semblent n’être qu’un fait essentiellement masculin où les femmes n’auraient eu qu’un rôle épisodique et marginal, cantonné dans des genres dits mineurs.
Dès l’Antiquité, les noms de grands artistes se révèlent ; on trouve la signature d’artistes peintres sur les vases grecs ou étrusques, mais on traverse plusieurs millénaires sans trouver un seul nom féminin. Pourtant rien n’exclue qu’il n'y ait pu y avoir un personnel artisanal féminin dans les boutiques, les échoppes produisant la céramique. Cela veut-il dire qu’il n’y eut jamais de créatrices ? Une des fresques de Pompéi nous prouve le contraire : non pas parce qu’on y trouve son nom, mais parce que l’artiste y figure, assise et le pinceau à la main, occupée à peindre une fresque. Il ne nous reste qu’à en déduire que la production féminine fut occultée, non qu’elle n’ait pas existé.
On trouve la trace de femmes peintres à partir du Moyen-age où leur présence dans les ateliers d’enlumineurs est attestée, telle cette Jeanne de Montbaston, épouse d’un copiste parisien au XIV°siècle.
Par la suite, quelques noms de femmes-peintres restent dans l’histoire, comme ceux de madame Vigée-Lebrun ou d’Artémisia Gentileschi, mais ils apparaissent peu dans les manuels d’histoire de l’art.
On cantonne généralement les femmes à des genres limités: le foyer, les enfants, l’intimité familiale, et naturellement, les fleurs. Si elles sortent de ces genres qui leur sont assignés comme par nature, on s’attache davantage à une vie retenue scandaleuse, comme pour Artemisia Gentileschi, qui fut une grande artiste, vivant de son travail de peintre.
Elle sont pourtant de plus en plus nombreuses jusqu’à nos jours à percer dans cette voie, non sans difficultés : ce domaine leur est encore plus fermé que celui de l’écriture, et l’académie des beaux-arts leur restera longtemps interdite, de même qu’il leur faut une dérogation pour passer un baccalauréat ou entrer dans une université. Et, quand elles enfreignent les limites des genres mineurs qu’on leur concède, elles font figure d’artiste maudite comme Camille Claudel qui osa opter pour la sculpture, considérée domaine masculin par excellence plus encore que la peinture. On la refusa de son vivant, mais une fois morte on mit ses œuvres au musée à côté de celle de Rodin, cause principale de sa déchéance. Pas même une salle pour elle…
Suzanne Valadon est d’abord la mère d’Urillo ; on ne s’intéresse qu’en second lieu à ses œuvres. Sonia Delaunay est d’abord l’épouse de Robert Delaunay.
Mary Cassat est l’amie de Degas; on oublie la délicatesse de ses toiles ; le talent d’une femme étant toujours minimisé, rarement évalué à sa juste valeur.
Rosa Bonheur, issue d’un milieu modeste trouve son style dans la peinture animalière mais y excelle ; l’histoire de l’art retiendra cependant davantage un Millet dont "l’Angélus" se trouvera facilement en reproduction à bon marché dans les demeures provinciales de la première moitié du siècle dernier.
Berthe Morisot enfin, est une figure emblématique de l’art dit «féminin », tranquille et intimiste.
Il faut attendre le XX° siècle pour voir les femmes se dédier à la peinture en abordant tous les sujets sans que cela fasse scandale. Avec Léonor Fini le monde de la peinture leur ait enfin ouvert, et permis.
A.P. in arte Floreal scrisse, le 22 janvier 2005