--> ...en attendant une retraite qui recule...
Si les blogues
féministes ne sont pas très nombreux dans la blogosphère italienne (encore
moins que sur la francophone, c’est dire), j’en ai toutefois trouvé
d’excellents. Parmi ceux-ci, il y a le Rosa Blog de Chiara Valentini,
journaliste dont le blogue est consacré à l’actualité, qu'elle présente d’un point de vue féministe, et parmi les sujets de société
qu’elle y aborde figurent souvent ceux qui concernent directement les femmes.
Donc, pour situer
le sujet dont il est ici question, il faut savoir que le taux de l’emploi
féminin en Italie est de 50% seulement contre 74% pour les hommes, et les
salaires des femmes inférieurs de 20% à ceux des hommes.
La prolongation
de 2 ans de l’âge du départ en retraite pour les femmes, qui est à 60 ans en
Italie, au nom de la parité, a été demandée par Emma Bonino, et devrait être
discutée au parlement italien Celle-ci est une représentante du Parti Radical
italien, une « fidèle » de Marco Panella, une « créature »
de ce dernier, qui fut son pygmalion. Dans sa jeunesse, dans les années qui
suivirent l’automne chaud, elle a été
une militante féministe active pour le divorce et l’avortement.
Elle est, depuis,
devenue une parlementaire libertarienne dans le sillage de son maître, et le type
de féminisme qu’elle représente désormais rappelle fâcheusement celui d’une Marcela Iacub. Actuellement Ministre du Commerce Extérieur et des Affaires européennes, elle a récemment jugé opportun de demander
l’allongement de l’âge du départ en retraite des femmes au nom de la parité, ce
qui procède exactement des idées masculinistes néo-cons selon lesquelles il y
aurait une « symétrie », alors que, comme l’ont démontré toutes les
études et recherches sur la condition féminine partout dans le monde, celle-ci
est asymétrique en ce que la balance penche nettement en défaveur des femmes à
tous points de vue.
Donc, comme le fait
remarquer Chiara Valentini : dans la
version Bonino, il semble qu’au fond on fasse une grande faveur aux femmes en
ne les renvoyant pas prématurément au foyer pour s’occuper des vieillards et
des petit- enfants. Le fait est que les femmes peuvent déjà travailler passé soixante
ans (et même jusqu’à 67 dans la fonction publique). Et beaucoup le font, parce qu’elles ont un emploi intéressant, ou
parce qu’elles n’ont pas le poids de charges familiales à supporter, ou parce
qu’elles ne sont pas éreintées par une vie épuisante. Mais elles le font parce
qu’elles l’ont choisi. Et cette idée n’est pas celle dont mon amie Bonino s’est
faite le porte-enseigne.
Outre aux
objections tout à fait pertinentes que fait ici Chiara Valentini, on pourrait
ajouter que bien des femmes continuent à travailler au de –là de l’âge minimum
de départ en retraite pour des raisons qui sont aussi d’ordre familial, mais indirectement, c'est-à-dire pour venir
en aide aux enfants au chômage, ou précaires, ou encore pour aider au financement
des études des petits-enfants, trop coûteuses pour le budget des parents.
Mais ce qu’on
remarque surtout, c’est qu’à de réels problèmes, la Bonino trouve une mauvaise
solution. Si on veut éviter aux femmes
la charge des vieillards et des petits-enfants, ce sont des structures
adéquates qu’il faut développer et créer, à savoir des crèches, des écoles
maternelles et des garderies pour l’après-midi si l’on n’institue pas le
principe de la scolarité à plein temps, et des maisons de retraites à des
tarifs accessibles pour les familles.
Le parcours de
l’emploi pour les femmes en Italie, jusqu’à l’âge de la retraite, est en effet
un des plus difficile en Europe, parcours leur créant une vie qui les épuise et que Chiara Valentini décrit dans son article en ces
termes :
…Il y a les années d’absence pour s’occuper des
enfants, la difficulté de trouver un nouveau poste si on perd son emploi. Et on
sait bien que dans n’importe quelle entreprise en crise ou une réduction du
personnel, les femmes sont les premières à être licenciées. De même qu’il est
désormais de notoriété publique que beaucoup d’employeurs font signer aux plus
jeunes parmi les femmes embauchées une lettre de démission en blanc. Si la
jeune femme est enceinte, il suffit d’ajouter la date et la future maman se
retrouve dehors. Cela est si fréquent qu’une loi est en cours d’élaboration au
parlement pour parer à une pratique aussi honteuse.
Bref, le parcours de l’emploi pour les femmes en
Italie, au moins jusqu’à présent, a été si difficile, explique Piccinini (1)
que seulement un pour cent d’entre elles arrivent aux fatidiques 40 années de cotisations.
Et si en 2005 il y a eu 62 mille hommes à obtenir la retraite, seules 13 mille
femmes y sont parvenues. A ceci il faut ajouter le fameux travail domestique,
qui en Italie est quantifié par des recherches internationales en trois heures
et demi par jour pour les femmes, et une quarantaine de minutes pour les
hommes.
Quant à
l’initiative incongrue de « l’amie Bonino », le moins qu’on puisse
dire est qu’elle ne vaut pas vraiment le pesant d’argent, d’ambre et d’agate des
bijoux bobo dont elle se pare pour nous apparaître dans les intervioues dont
les télés nous ont gratifiés, depuis ses lointains et luxueux bureaux
parlementaires d’Europe ou d’Italie, et maintenant ministériel.
(1) une représentante syndicale de la CGIL