Ma famille est
pour la majeure partie déchristianisée depuis plusieurs générations. La plupart
ne sont donc pas baptisés, ne sont jamais allés au catéchisme, ne sont pas
mariés à l’église, et n’ont pas fait baptiser leurs enfants. Mes enfants ne
sont pas baptisés non plus. Famille laïque où la laïcité est ancrée dans les
mœurs, une valeur à laquelle on tient, et qui vote à gauche depuis que le droit
de vote existe, sans doutes. Pour l’école publique et opposés à l’école privée.
Mes parents, et
les membres de la famille de leur génération, étaient à l’époque contre la
guerre l’Algérie, ce qui leur a valu bien des brouilles au bureau, chez les
commerçants du quartier. Personne dans ma famille n’a jamais mis les pieds aux
« colonies » du temps où il y en avait.
La majorité de
mes cousins et cousines vivent en région parisienne, dont certains en
Seine-Saint-Denis. Une de mes cousines a mis ses enfants dès le départ dans une
école privée, l’école primaire la plus proche où elle aurait dû les inscrire ne
lui semblant pas offrir toutes les garanties d’apprentissage, pour la raison,
selon son opinion, que les classes étaient majoritairement peuplées d’enfants
d’immigrés.
Un autre de mes
cousins avait mis son fils à l’école publique primaire, également peuplée
majoritairement d’enfants d’immigrés. Il n’avait pas tenu compte des objections
ni de la réprobation de certains de ses collègues et voisins qui s’en
étonnaient, s’en indignaient même. Partant du principe que l’école publique est
l’école de tout le monde et que les enfants des immigrés ne sont pas de ce fait
pires que les autres, il n’était pas revenu sur sa décision. Les choses ne se
passèrent d’ailleurs pas mal, son fils avait ses copains, une situation assez tranquille.
Le fait est que lui et sa femme ont commencé à se poser des questions lorsque
leur fils est arrivé en CM2. Il avait acquis un vocabulaire qui n’était pas
précisément celui en usage en famille, leur laissant quelques perplexités. Les
résultats scolaires étaient bons, même étonnement bons, ce qui a tout de même
fini par surprendre mon cousin et sa femme en constatant les lacunes de leur
fils au niveau de l’analyse grammaticale par exemple, et d’un certain nombre
d’autres choses qu’ils se souvenaient acquises à cet âge. Ils ont décidé, à
regret, de le mettre en classe de 6ème dans une école privée, où il
fut accepté sur présentation du dossier scolaire, n’augurant rien de bon du CES
dans lequel ils auraient en principe dû envoyer leur fils, qui eut au début des
difficultés non indifférentes à se mettre au niveau.
Je n’ai pas connu
ce genre de problème avec mes enfants. Ici, en province, les écoles sont à peu
près ce qu’elles étaient pour ma génération, en France. Par contre, à cause de
l’heure de religion catho, en n’y inscrivant pas mes enfants, j’ai eu quelques
problèmes avec certains enseignants, minoritaires mais il en existe. Ils
avaient tendance à marginaliser mes enfants, tendaient à caser le bon dieu dans
les mathématiques et la grammaire, bref, là où il n’avait absolument rien à
faire, surtout à l’école publique.
J’ai dû me
battre, avec acharnement (mais je suis acharnée), protester dans les assemblées
de parents d’élèves, faire un foin d’enfer en remuant ciel et terre dans les
bureaux des assesseurs municipaux, mener une véritable campagne anticléricale
dans toutes les associations locales (où j’ai obtenu beaucoup de
compréhension), menacer de procès des instits, qui ont fini par en rabattre.
Il y a, ici, des
gens que je ne salue jamais. Auxquels je n’adresse jamais la parole même s’ils
sont à côté de moi au supermarché. Il arrive que je change ostensiblement de
trottoir quand je croise certaines personnes. Quant aux quêteurs venant quêter
pour les fêtes paroissiales, ou les Témoins de Jéhovah, (il y a ça aussi), il y
a beau temps qu’ils ne sonnent plus jamais à ma porte. Il y en a certains que
j’ai dû de virer avec perte et fracas pour qu’ils comprennent de ne jamais
revenir.
Il en est de même
avec l’islam. Les voilées, ce n’est même pas la peine de me parler
d’acceptation à leur égard.