Italie: en fin de compte...
J’ai traduit, en
partie seulement, car l’article est long et certains passages se référent à des
situations ou à des personnalités politiques trop locales pour être connues ou
significatives pour les lectrices-teurs français-es ou francophones en général,
ce texte lu chez FikaSicula et donc fiable, d’un journaliste sicilien
indépendant (que je ne connaissais pas encore jusqu'à présent), une figure un peu comparable à Plume de presse sur le web
francophone, qui m’a semblé bien refléter l’actuelle situation en Italie au
lendemain des élections. Voici ce qu’il en est :
En fin de compte, après la télé, l’eau, les
téléphones et autres, ils ont privatisé la politique. On peut voter Coca-Cola,
ça c’est facile, il suffit de vote pour l’homme le plus riche du royaume en
espérant que quelques sous roulent jusqu’à soi. Sinon on peut voter Pepsi, mais
là il faut perdre un peu de temps à lire les journaux. Enfin pour l’un des
deux. A la fin, c’est Berlusconi qui a gagné, mais Veltroni a gagné aussi à sa
façon. (…) Non seulement Veltroni ne démissionne pas, mais il est même
ému ; non seulement Berlusconi ne finira pas en prison, mais il y enverra
les juges et les carabiniers.
Veltroni. “Une
machine à perdre”. Son message signifiait : « essayons de perdre les
élections, en échange on se débarrassera de Prodi, de D’Alema, des
manifestations, des syndicats et de toutes ces choses ennuyeuses qui empêchent de
faire des Grands Leaders sans avoir de comptes à rendre à personne ». De
la confusion et c’est tout. Maintenant il n’y a plus de confusion, il y a
Dell’Utri, Calderoli, tant pis, en échange dans notre fief il n’y en a qu’un
seul qui commande. Comme en Russie, où Poutine a gardé du communisme le pouvoir
et la discipline, et jeté aux orties tout le reste.
(Une campagne
commencée avec « Nous vaincrons comme les Giants de Chicago » et
finie avec un « Allo Duce ? Congratulation pour votre victoire »
Comme fait Al Gore !).
Finocchiaro
(Anna). C’était la Ségolène
italienne, la future femme présidente du conseil, elle était partout et nulle
part à la fois. Maintenant elle est seulement la personnalité politique la plus
catastrophique de toute l’histoire politique de la Sicile. Qu’elle n’avait
pas l’ombre d’une chance de gagner, on le savait déjà, vu qu’elle n’avait
jamais gagné une élection. Pourquoi l’ont-ils présentée (il ne fallait pas être
un génie pour comprendre que la
Borsellino aurait obtenu plus de voix) ? Parce que
Veltroni en a donné l’ordre, et bonjour la démocratie. E nous les antimafieux
n’avons pas été capables (chacun pour soi et Dieu pour tous) de l’éloigner d’une
élection où se jouaient dix années de la Sicile.
Bossi. Il a
réussit à faire digérer aux lombards la délocalisation des entreprises,
désormais en Chine. Bravo. Comme Goebbels, quand il a réussit à persuader les ouvriers de Berlin que
l’inflation, c’était de la faute des juifs.
Prodi. Ironie du
sort, le seul à avoir fait gagner (deux fois) la gauche a été un chrétien-démocrate.
Et –comble de l’ironie- il a été deux fois poignardé dans le dos par en ex
« communiste ».
Bertinotti.
Ç’aurait pu être une gauche décente. Avec Vendola, avec Zanotelli, mais de
toutes façons pas avec un secrétaire de parti. Ç’est une gauche de notables qui
s’est présentée, avec le chef du parti A, le sous-chef du parti B, etc.
Toutankamon représentant l’Egypte Alternative, Hammourabi pour la Gauche Babylonienne,
etc. (…) Le problème n’était pas de se cramponner à la faucille et au marteau
( …). C’était de faire une gauche de jeunes, avec tous les détails
désagréables que cela comporte, ou de rester accrochés à ses fauteuils (de velours rouge).
Le “peuple de
gauche”. Le meilleur d’Italie, celui qui autrefois en faisait un pays civil. Il
a voté avec discipline comme les chefs lui ont dit de voter. Les chefs ont été,
au fur et à mesure, Staline, Togliatti, Berlinguer, Ochetto, D’Alema, Arlequin.
Il a obéi à tous avec une discipline héroïque. Il aurait peut-être mieux valu
obéir un peu moins et raisonner un peu plus.
Et puis il y a
nous. Nous on a été à la hauteur. Pas même les socialistes l’avaient été, quand
Mussolini est arrivé. Ils étaient convaincus qu’il s’agissait encore de droite
et de gauche, que Benito était seulement un philo-savoyard plus méchant que les
autres. Mais il n’en était pas ainsi. Ce furent les jeunes d’alors qui le
comprirent (Gobetti, Gramsci et les autres)et cette fois encore les cartes de
la gauche sont entre les mains de la dernière génération. Aux vieux reste le
devoir, essentiellement et pour ceux qui le pourront, de ne pas trahir. Les
partis qui abattront Berlusconi n’ont pas encore de nom. Et pourtant, ils sont
déjà en train de naître.