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Adieu
--> A toi

J’ai du prendre quelque chose comme une rhinite, les yeux le nez la gorge me piquent, et j’ai la voix enrouée. Le contraste entre la température extérieure qui avoisinait en ville les 38 ° ces jours derniers, et l’air climatisé des cars, sans doutes. J’ai échangé un groupe en espagnol pour la journée contre un autre en anglais pour une demi-journée. Je suis rentrée chez moi vers trois heures, j’ai mangé vaguement quelque chose, et puis je me suis enfilée au lit, exténuée.

 

J’ai mal à la tête et mal au ventre. Je sombre dans un demi-sommeil, et des images se mettent à défiler sous mes paupières closes.

 

Nous remontons un sentier escarpé vers la route. En contrebas, la mer et les rochers. Et le long du sentier, de part et d’autre, d’étranges trous béants où descendent parfois quelques marches taillées dans la pierre. Ce sont des tombes étrusques, ouvertes et pillées depuis des siècles. C’est une nécropole d’époque hellénistique, du IVème siècle Av.J.C. que nous traversons, en fait. Ce promontoire en est truffé, un véritable gruyère, pas même exploré, trente ans après, aucunes fouilles n’ont été faites, les gens ignorent d’ailleurs où ils sont, aucune pancarte ne signale quoi que ce soit, mais il y a désormais de nombreux touristes qui descendent se baigner. A l’époque, il n’y avait pas grand monde. En descendant, nous sommes entrés dans ces grottes avec la torche électrique que tu avais emmené pour me faire voir l’intérieur où il n’y a rien que les parois lisses. Tandis que nous remontons, le soleil descend et sa lumière rase le maquis d’où viennent des bruits furtifs, parfois près de nous. Des sangliers sauvages, me dis-tu, que nous ne voyons d’ailleurs pas. Je ne suis pas très rassurée, mais tu dis qu’ils n’attaquent que s’ils se sentent attaqués, et que sinon le seul bruit que nous faisons les font fuir. Effectivement, nous n’en verrons aucuns.

 

Nous arrivons finalement dans un champ de hautes herbes jaunes et desséchées que nous traversons à l’orée des bois, main dans la main. La tienne remonte autour de ma taille puis m’entoure les épaules, dans une nuit étoilée où l’on distingue la voie lactée la lune brille haut dans le ciel et projette l’ombre de grands chênes-verts séculaires, ombre complice de l’astre nocturne dans laquelle nous nous arrêtons un moment et nous embrassons.

 

Par un après-midi solaire où la chaleur est forte, des draps blancs recouvrent un lit dans une pièce au sol de tomette rouge et aux persiennes closes par lesquelles filtrent quelques rais de lumière formant des volutes où de minuscules poussières voltigent. Tu es allongé dans la pénombre, nu. Et la femme aux longs cheveux noirs qui se glisse auprès de toi et t’enlace, c’est moi. Comme nous étions jeunes, alors !

 

Nous marchons à présent sur la grève en nous tenant par la main, les pieds dans l’eau, en maillots de bain. Ce doit être en juin. Ou peut-être en septembre ; il n’y a guère de monde. Ce n’est plus toi mais un autre, mais c’est toujours toi. Nous voici dans l’eau maintenant, soulevés par les vagues, puis au creux des dunes, allongés sur des serviettes tandis que des gouttelettes brillent comme des perles de verre irisées sur nos corps brunis par le soleil de l’été.

 

Un homme encore jeune, mince, est assis devant des cartes sur une table. Je ne distingue pas ses traits mais c’est toi. Encore et toujours toi. Tu fais une réussite à ce qu’il semble, en tous cas tu es absorbé par ces cartes à jouer qui sont devant toi et que tu observes. Deux rois dirait-on. Au chiffre noir, de pic et de trèfle sans doutes.

 

Je me recroqueville sur le côté, passe un bras sous l’oreiller et l’autre par-dessus et bascule dans le néant d’un sommeil de plomb, sans rêves.

 

Adieu.

 
Ecrit par Lory, le Vendredi 15 Août 2008, 23:54 dans la rubrique Florycalque.