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Jardin de banlieue
A l'époque, les rues affreuses, longues comme un jour sans fin et rectilignes, aux trottoirs non asphaltés plein de flaques bouillasseuses dès qu'il pleuvait, n'avaient pas d'arbres, contrairement à maintenant. Le côté positif était qu'il y avait beaucoup moins de voitures que maintenant, et que la rue était à nous, les mômes, qui étions nombreux puisque nous étions la génération du baby boum. Marelles, parties de balles aux prisonniers, de "chat-délo" ("aux gendarmes et aux voleurs", en fait, mais on appelait ça chat-délo) interminables qui, l'été, pouvaient reprendre après dîner. Toutes choses qui seraient impossibles maintenant vu la circulation.

Loin de Paris en temps, des transports en commun longs, c'est au contraire maintenant devenu la proche banlieue, zone pavillonnaire plutôt résidentielle pour la Seine-Saint-Denis, relativement bien desservie. A l'époque, les pavillons étaient récents et poussaient comme des champignons. Rien à voir avec le quartier où je suis née, où avec bien du mal mes parents avaient réussi à trouver un logement exigu et totalement dépourvu de confort, sans salle-de-bain, les waters dehors, et un escalier extérieur pour aller de la cuisine à la chambre qui était au dessus. Je me souviens du froid qu'il faisait pour y monter en plein hiver. Une bicoque coincé en contrebas parmi d'autres bicoques semblables, en face d'affreuses usines d'avant -guerre. La crise du logement sévissait alors et les jeunes couples trouvaient difficilement à se loger, mal. Raison pour laquelle mes parents avaient fait construire un pavillon dans un autre quartier, qui avait été des terrains maraîchers.

Si les rues étaient laides, par derrière les maisons se trouvaient les jardins, et là, on se serait cru à la campagne.



Avec mon frère, aussi blond que je suis brune, bizarrerie de la génétique, les gens qui ne nous connaissaient pas ne voulaient jamais croire que nous étions frère et sœur, nous grimpions dans le cerisier où l'abricotier pour nous goinfrer de fruits, ce qui ne manquait pas d'exaspérer ma mère qui nous disait que nous aurions la diarrhée, et que si on bouffait tout, elle ne pourrait pas faire de confiture, et râler mon père qui disait qu'on allait encore casser une branche, ou nous casser un abatis.

Tant que j'ai été gamine, j'y ai été plutôt heureuse. Devenue adolescente, c'est devenu la galère. Mes copains d'enfance avec lesquels je jouais aux cow-boys (les jeux de filles, j'aimais pas trop, les poupées, les baigneurs, je ne me souviens pas avoir tellement joué avec) dans les bosquets de lilas des terrains vagues, mes copines avec lesquelles je jouais aux balles, à la corde à sauter ou à la marelle se retrouvèrent disséminés dans différents collèges ou lycées.

Premières sorties dans Paris... Paris! Mais pourquoi diable mes parents n'avaient-ils pas acheté, pour le même prix à l'époque que celui d'un pavillon de banlieue, une de ces maisons des cités-jardins du XXème qui coûtent maintenant une fortune, à retaper, à deux pas du métro? Mon père aurait eu un jardin aussi, puisqu'il ne savait pas s'en passer. Sans compter que les Buttes Chaumont ne sont pas loin. Et ma mère aurait été la plus heureuse des femmes; elle n'a jamais aimé que Paris. Mais non, rien à faire. Il n'a jamais voulu bouger de son coin de banlieue.

Ou dans le XVIIIème? A l'époque dans les petites rues vers la place des Abesses, il était possible d'acheter de vieux appartements mêmes assez grands à des prix abordables. D'accord, il n'y avait pas de jardin, mais la butte Montmartre et les jardins du Sacré-Cœur étaient à deux pas.

Quand j'y repense, c'est de Paris que j'ai la nostalgie. Quand mes parents ne seront plus, je ne remettrai jamais les pieds en Seine-Saint-Denis.
 
Ecrit par Lory, le Lundi 20 Octobre 2008, 17:25 dans la rubrique Florycalque.