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La guerre des pauvres

Il y en a sans doutes d'innombrables de par le monde, mais ces derniers temps deux d'entre elles ont fait, très relativement (il y a tellement de nouvelles sportives ou people pour la faire), la une des journaux.

En
Afrique du sud, où 5 millions d'immigrés originaires d'Afrique noire, principalement du Mozambique, du Zimbabwe, du Malawi ou de Somalie, ont remplacé les noirs sudafricains des ghettos aux temps de l'apartheid, et se sont trouvés confrontés à une vague de xénophobie sans précédent de la part des sudafricains noirs un peu moins pauvres qui voient en ces immigrants la cause de la perte de leur emploi depuis que la croissance de l'économie, constante depuis la fin de l'apartheid voici 15 ans, a commencé a stagner tandis que l'inflation augmente. Au cri de "chassons les étrangers", de véritables chasses à l'homme ont eu lieu, au point que les forces de l'ordre ont du s'interposer pour éviter la poursuite des lynchages et des stupres qui ont fait une douzaines de morts.

Sous nos tropiques à nous, il s'en est fallu de peu pour que ne survienne la même chose à Naples, entre les autochtones et les roms. S'il n'y a pas eu mort d'homme bien qu'il y ait eu quelques blessés graves, les camps de nomades de la banlieue napolitaine ont été incendiés à plusieurs reprises, au point qu'ils sont plus de 500 à avoir du être évacués sous la protection des forces de l'ordre.
Là, ce n'est pas la perte d'emplois ni la récession, ni le chômage endémique depuis des décennies en dépit des fleuves de fric de la "caisse di Midi" dévolu par l'état puis par l'UE pour le développement du "mezzogiorno", pompé par la mafia politique locale, à en être la cause. Encore que...

Mais la raison en est toujours la même: des mal lotis voient débarquer des plus pauvres qu'eux s'installer à demeure et vivre en quelque sorte "sur l'habitant", habitant qui aurait lui-même bien besoin d'aide sociale pour pouvoir subsister.

Ce qui a mis le feu aux poudres est un fait divers survenu à la fin du mois d'avril dernier: une fille rom, mineure elle-même (en fait une gamine de 14 ans), s'est introduite dans un appartement et à enlevé un bébé de six mois assis sur sa chaise de bébé tandis que sa mère lui préparait à manger dans la cuisine. La mère s'en étant aperçue immédiatement s'est mise à sa poursuite en hurlant au secours de sorte que tout le quartier est descendu dans la rue pour courir sus à la voleuse d'enfant, qui aurait été lynchée si la police n'était arrivée à temps.

Il parait difficilement crédible qu'une gamine de 14 ans s'empare d'un bébé par pure velléité maternelle. Il est infiniment plus probable qu'elle y a été engagée ou contrainte par un réseau de trafiquants d'enfants, soit pour les organes soit pour autre chose.

Et c'est là qu'on se rend compte qu'en réalité, deux niveaux se superposent dans l'explosion de violence qui a eu lieu.

Les femmes du quartier se sont ruées comme des furies sur les palissades dressées à la hâte par les nomades retranchés dans leur camp et qu'elles auraient certainement défoncées si les flics ne s'étaient interposés tant elles étaient déchaînées et voulaient en découdre, mais il serait bien stupide de leur imputer je ne sais quelle malignité congénitale aux femmes du sud, ou une méchanceté de nanties dans des quartiers où les gens sont pour la plupart sous le seuil de la pauvreté. On peut dire tout ce qu'on veut des gens du sud sauf qu'il manquent de générosité en dépit de situations souvent précaires ( on se souviendra du film de De Sica "L'or de Naples"), et tous les témoignages se recoupent: elles avaient donné des vêtements d'enfants trop petits pour les leurs aux quémandeuses, que souvent elles connaissaient au moins de vue, leur avaient parfois donné du lait en poudre pour leurs bébés, ou des biscuits, les avaient parfois fait entrer chez elle pour prendre de l'eau, faire une lessive ou laver leurs nourrissons. Bref, elles se sont senties flouées, le genre de chose qui passe vraiment mal dans les régions du sud.

Mais ce sont les hommes qui ont mis le feu et là, l'ombre de la mafia locale, la Camorra, que les autochtones appellent le Système, vu que le système de l'état brille par son absence et que le vide est toujours rempli par quelque chose, se profile sur la toile de fond des évènements.

Dans ces banlieues populaires où le taux de chômage est très élevé, la délinquance est monnaie courante, repris de justice en tous genres se livrent à tous les trafics, sauf celui d'enfants; s'il y a disparition ou mort d'enfants, c'est en général suite à des violences domestiques où à des vendettas familiales. Un travail "honnête", c'est un travail au noir comme par exemple avoir le monopole du collage d'annonces des pompes funèbres pour les décès dans les quartiers.

Comme le disent eux mêmes les autochtones, "personne ne vole". Les gens laissent les portes de leur maison ou de leur voiture (volées ou non assurées) ouvertes en toute confiance: s'ils volent, c'est dans les quartiers aisés où les voitures sont fermées et assurées et les portes des demeures blindées. Depuis l'installation des camps de nomades, une micro délinquance s'était installée avec les nouveaux venus, jamais vraiment acceptés et perçus comme des intrus, entrant par les portes et les fenêtres pour rafler tout ce qui pouvait leur tomber sous la main, jusqu'au linge séchant aux fenêtres ou aux balcons.

Outre à cela, les réseaux de délinquance locaux se sont trouvés sur leur territoire en concurrence avec ceux,
nouveaux venus, de la délinquance rom. Et là sans doute réside la raison de représailles qui n'attendaient pour exploser qu'une étincelle; l'enlèvement du bébé mit le feu aux poudres.


Mais si l'on pense que, dans le sud de l'Italie, des gens sont restés plusieurs décennies dans des baraquements à la suite de tremblements de terre en attendant d'etre relogés, et que dans les zones périurbaines, la viabilité attend encore d'etre réalisée, les nomades ne sont pas près de voir des camps décents s'offrir eux avec le nécessaire comme l'électricité ou l'aduction d'eau...

Ecrit par Lory, le Dimanche 18 Mai 2008, 20:33 dans la rubrique Actualités.