Les années ’70 furent celles de l’avancée féministe et de ses grandes conquêtes: la loi sur l’avortement et sa dépénalisation, la contraception libre, la fin du « patriarcat » en ce que l’autorité du « chef de famille » se mua en « autorité parentale ». Ce furent de belles années, portant avec elles l’optimisme et l’espoir avec les mini-jupes ou les longues jupes fleuries des femmes, qui pour la première fois descendirent dans la rue. Il ne s’agissait plus d’une poignée de suffragettes engoncées dans leurs vêtements d’un autre âge, mais bien de la population féminine dans son ensemble qui se reconnut dans ces milliers de femmes qui formèrent des cortèges envahissant la rue. Ce fut peut-être encore plus spectaculaire en Italie où les slogans comme « Io sono mia » (« je m’appartiens », littéralement « je suis à moi », ou « Temete, le streghe sono tornate » (« Tremblez, les sorcières sont de retour »), le tout en brandissant les bras, joignant les pouces et les index pour former le signe du sexe féminin sous les yeux des passants ébahis, sont restés emblématiques des revendications des femmes et de leur volonté exprimée pour la première fois sans équivoque, haut et fort, de ne plus être la fille de , la sœur de, la femme de, mais elles-mêmes.
Ce furent les années où l’on prêta pour la première fois attention à l’écologie, les années où les citadin/es partirent volontiers en « communauté » pour aller « élever des moutons dans le Larzac ». Les hommes portèrent bientôt les cheveux aussi longs que les femmes, il n’était pas rare qu’elles les portent plus courts qu’eux, les vêtement unisexes firent leur apparition et le jean fut roi pour les deux sexes. Ce fut, apparemment, une véritable libération, l’affranchissement d’une manière de vivre soudain obsélète, dépassée. Ce le fut véritablement du point de vue sexuel car, en ces temps où le SIDA ne menaçait pas encore, les femmes avaient une liberté toute neuve et la pillule en poche.
Mais qu’en fut-il vraiment et à qui profita réellement cette liberté si chèrement, si durement et si fraîchement acquise, cette liberté si fragile que les femmes venaient tout juste de conquérir, l’arrachant bien souvent par la lutte contre les familles, l’entourage ? Si les garçons connurent quelques discussions pour la longueur de leurs cheveux, il en coûta bien davantage à celles qui choisirent d’avorter où se retrouvèrent à devoir élever seule un enfant.
Les femmes avaient désormais leur permis de conduire et parfois leur voiture. Tout d’un coup, « la femme au volant » n’était plus « la mort au tournant » ; c’était bien pratique pour accompagner les mômes à l’école avant d’aller travailler. Les mômes qu’elles accompagnaient à l’école avant d’aller travailler. Mais, en dehors des véhicules, tout ce qui était « technique » restait pour elles quasiment tabou. Rien en ces années ne fut plus macho que la pop music. Les groupes qui chantaient la rébellion et la liberté étaient exclusivement masculins. Dans un tel panorama, une Janis Joplin fait figure d’exception, et ce n’est sans doute pas un hasard si elle mourrut jeune. Les « chaînes hi-fi » qui étaient comme les guitares Fender le fin du fin étaient autant de prérogatives masculines. Les filles pouvaient bien mettre un disque, mais il n’était pas question qu’elles se mêlent de régler les bass et autres trebbles, et si par hasard elles se hasardaient à trifouiller les boutons, on pouvait être sûr qu’un quelconque mâle de la bande ou du groupe rappliquait vite fait pour prendre la direction des manipulations. La technique, c’était leur chasse gardée, et gardée jalousement. Ils ne manquaient pas de vous décocher un regard sombre pour vous éloigner et souligner ainsi leur domination sur les instruments. Ils étaient loin de se précipiter avec une telle célérité sur les casseroles en cuisine. Aujourd’hui l’informatique a fait son apparition, et pratiquement chaque foyer, chaque famille possède un ordinateur. Tous les employés s’en servent, les femmes, nombreuses dans le tertiaire, aussi. Mais bien peu sont véritablement informaticiennes, ingénieures dans cette discipline. Elles ont en général davantage que les hommes soin du matériel, qu’elles détériorent moins, mais sont plus appréhensives, ont davantage peur sinon de se tromper, d’endommager, de casser quelque chose. Elles se retrouvent plus inhibées devant cette nouvelle technologie que leurs congénères masculins. Et, si elles se servent aussi bien qu'eux d'un ordinateur, eux semblent ne pas encore avoir appris à programmer la machine à laver.
Commentaires :
stupidchick
J'étais justement en train d'y penser, aux femmes pour qui avoir le permis a tout simplement signifé emmener les enfants à l'école, aux sorties du mercredi.
Quant aux instruments et à la technique, j'ai l'impression de lire ma propre expérience. "Attends, je vais te régler ton ampli".