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Séparée à domicile

Quand j’ai divorcé il y a 20 ans ou presque, j’avais le choix entre rester, repartir en France avec ma fille, où sans. La vie (relativement) agréable et égalitaire que nous avions eue les premières années s’était peu à peu estompée pour laisser place aux stéréotypes traditionnels, ce qui s’accentua pour devenir définitif après la naissance de ma fille. J’avais en outre quelques difficultés à m’adapter à ma belle-famille, envahissante comme toutes les familles italiennes. Mon mari prit donc une femme (plus jeune, évidemment, tant qu’à faire ; les hommes quittent rarement une femme pour une autre plus vieille, du moins je n’ai jamais rencontré ce cas de figure autour de moi dans mon existence), et surtout plus malléable. Une qui correspondit tout à fait au schéma habituel, pour qui supplanter une autre femme sembla valorisant, elle ne devait pas s’estimer beaucoup, comme c’est d’ailleurs souvent le cas des femmes, auxquelles on enseigne à se sous-estimer pour plaire. Ce fut donc elle à se farcir la belle-mère, et là je dois dire que pour moi ce fut autant de gagné.

Repartir en France avec ma fille signifiait devoir aller habiter chez mes parents dans un premier temps, une soupe à la grimace certaine en perspective. Me trouver du boulot, c'est-à-dire un job mal payé, quant à tenter de faire carrière, pas évident. Et surtout, me heurter aux problèmes avec le père qui n’aurait sûrement pas accepté de voir sa fille partir avec moi. Lui laisser ma fille, c’était ne la revoir que rarement et perdre contact avec elle. J’ai hésité. Tout cela m’a paru insurmontable. Je suis restée.

J’avais 35 ans, ma vie était foutue. Foutue pour foutue, j’ai eu un autre enfant avec un autre homme, parce que le temps passe, l’échéance biologique est certaine ; je ne voulais pas avoir un autre enfant passé 40 ans. Je le connaissais avant, c’était un ami de mon mari, une connaissance rien de plus. Entre temps lui aussi avait divorcé. Je connaissais aussi sa femme, d’ailleurs, que je n’avais jamais revue. Un bel homme, du reste, mais pas mon genre. Il a beaucoup insisté, parce qu’à vrai dire, il ne me plaisait pas tellement. Mais j’étais seule, et je me suis dit qu’après tout, il avait ses qualités, et qu’avec le temps, ça aurait peut-être marché. Pas du tout. Et une autre belle-famille aussi pénible que la précédente dans un genre très différent.

Si j’avais trouvé un boulot, et surtout un boulot me permettant de vivre, il y a beau temps que je l’aurais quitté. Mais je n’ai pas trouvé.

J’ai fini par sombrer dans une dépression assez grave, qui s’est terminée par une tumeur. Je m’en suis sortie. Ou plutôt, les médecins m’en ont sortie. Depuis, j’ai mis une pierre sur l’amour, les sentiments et tout le bataclan. Je suis séparée à domicile, c’est plus économique. Il faut bien vivre, tant qu’on ne meurt pas.


Ecrit par Lory, le Lundi 20 Août 2007, 09:02 dans la rubrique Florycalque.

Commentaires :

inconsciente
inconsciente
20-08-07 à 13:05

C'est courageux de tirer ainsi une croix sur l'amour et les sentiments.
Moi c'est ce qui me fait vivre, je ne pourrais pas survivre sans.
Enfin peut-être, mais je n'en sais rien je n'ai pas essayé.

Tes mots sont durs mais touchants.
On sent la souffrance derrière.
Tu résumes tout, très vite, mais on se prend quand même comme une claque dans la gueule en les lisant.

Bon courage en tout cas, et continue d'écrire :)

 
lorycalque
lorycalque
21-08-07 à 00:01

Re:

On prépare les filles dès l'enfance à etre moins qu'un garçon, on leur demande plus et on leur donne moins. On les habitue à l'infériorité pour qu'elles aient besoin de se sentir aimées, afin de se sentir dépendantes et de fournir ainsi des services gratuits, et qu'elles se sacrifient pour obtenir ce qu'on considère normal qu'un garçon obtienne sans avoir besoin de ne rien donner, ou de donner quand ça lui plait, en toute autonomie.

Mais quand le Prince Charmant (une fadaise servant à faire se comporter les filles comme autant de jolies Barbies gentilles et disponibles) se transforme en crapaud (ce qui ne manque jamais d'arriver parce que ce sont, comme nous, (qui ne sommes pas nécessairement gentilles et disponibles) des humains et non des anges, que reste-t-il?

Nous les femmes sommes plus diplomées (parce qu'on bosse plus et qu'on ne nous passe rien) et pourtant nous trouvons moins facilement les boulots intéressants et bien payés. A travail égal nous gagnons en moyenne 20% de moins. Nous fournissons cependant en moyenne 2 heures par jour de travail domestique de plus qu'eux. Et quand nous sommes vieilles, nos retraites sont en moyenne de 30% inférieures aux leurs.

80% des boulots précaires, inintéressants et mal payés sont faits par les femmes. 80% des presonnes précaires sous le seuil de pauvreté sont des femmes. C'est ça, la réalité, pas le Prince Charmant.

Il en reste quoi de l'amour là dedans, il est où? Le jeu n'en vaut pas la chandelle.