La semaine du 15
août est, avec les fêtes de fin d’année, la période de l’année que je redoute
le plus. Il n’y a ni Pâques, ni Pentecôte, ni 1er Mai qui tiennent à
côté. Véritables rushes, courses contre la montre, j’en suis désormais dispensée
pour les fêtes de fin d’année ; les enfants sont grands et n’attendent
plus impatiemment leurs cadeaux sous l’arbre de Noël, et passent le réveillon
du Jour de l’An avec leurs amis. Je n’ai plus à affronter cette terrible
épreuve et corvée consistant à se sentir seule dans la cuisine comme sur un
champ de bataille.
La semaine du 15
août, je prends soin de faire le gros des courses une semaine à l’avance pour
avoir à sortir le moins possible durant cette semaine fatidique où les
envahisseurs fomentent des queues infinies dans les supermarchés, les pompes à
essence, les bureaux de poste, bref, dans tous les lieux publics possibles et
imaginables. Inutile, en outre, d’espérer trouver une place pour se garer, où
que ce soit. Même se déplacer en vélo devient périlleux.
Je délaisse la
plage cette semaine là et je m’enferme chez moi, ne sortant pour ainsi dire que
dans le jardin en dépit de l’invasion de moustiques nécessitant tout un
attirail spécifique pour ne pas trop se faire bouffer.
Les quelques amis
citadins qui sont en vacances passent me voir ; eux, ils affrontent les
plages encombrées, ils n’ont guère le choix d’autres dates que celles de la
fermeture annuelle des boîtes où ils travaillent, et si d’aventure ils en ont
le choix, ils sont tenus par celles des congés scolaires, ou bien par celles du
conjoint.
Tandis qu’ils
vont se faire rôtir dans la cohue estivale, je reste à l’ombre à bouquiner dans
mon jardin ou à bricoler, et quand ils reviennent, rouges comme des écrevisses,
on joue au ping-pong, ou aux raquettes de plage, et on organise des grillades.
Viandes parsemées de romarin ou d’origan, ou poissons garnis d’ail et de basilic, poivrons et aubergines recouverts
d’un filet d’huile d’olive. Tomates, olives, et une belle glace au dessert.
Aller à la plage
n’est pas encore payant, de même que les promenades dans la campagne.
Heureusement, car c’est à peu près les seuls luxes que je puisse m’offrir.
C’est à peine si j’ai de quoi aller en France une fois par an, voir mes parents
bien vieux désormais, et quand j’y pense, mon cœur se serre, la vie aussi.